4.06 Waldorf Stories


Une grande série est une série qui ne vous lâche plus après la fin d'un épisode. Son ambiance, ses personnages, tout ça reste en vous longtemps après le générique finale. Mad Men est une grande série et chaque épisode est tellement réussie qu'il me laisse toujours rêveur, perdu dans une atmosphère étrange et mélancolique. Ce nouvel épisode est celui qui m'a laissé une plus forte impression cette saison. 

Lorsque Don reçoit un prix pour une publicité et que Roger écrit ses mémoires, c'est l'occasion de revisiter la naissance d'une collaboration et les premiers pas de notre publicitaire favori. Ces flash-backs sont parfaitement intégrés dans un récit déjà très dense et qui gagne encore plus en nuances et complexité. Tout reste très fluide et on ne tombe jamais dans l'exercice de style. Par petites touches, nous replongeons dans le passé et revisitons des scènes magnifiques, en particulier celle entre Roger et Joan. On apprend comment Don a obtenu son poste, avec toute la malice qu'on lui connait, éternel menteur. Et on peut dresser un parallèle avec la situation actuelle des personnages. Roger vieillit mais n'a pas changé ses habitudes, il manque juste d'attention et n'est plus vraiment à sa place dans le nouveau monde. La candeur et l'idéalisme de Don ont été remplacé par des désillusions et une amertume qui le conduisent à boire et faire les mêmes erreurs que son collègue. Nous voyons qu'il est toujours capable du meilleur comme du pire mais qu'il ne cesse de chuter autant professionnellement que personnellement, dans ses rapports humains, notamment avec les femmes qui entrent et sortent de son appartement enfumé. Encore une fois, l'ambiance varie entre mélancolie et tristesse, on navigue entre passé, présent et futur et les scénaristes nous entraînent dans un récit toujours aussi passionnant, qui évite par miracle une redondance qui lui pend pourtant au nez. 

L'épisode aurait pu seulement se concentrer sur la relation entre Don et Roger, mais parvient à développer le reste des personnages de manière subtile, en faisant avancer tranquillement le récit. La guerre de territoire entre Pete et Ken refait surface, mais les règles ont changés. Peggy continue de se libérer le corps et l'esprit dans une scène très drôle à l'hôtel avec le nouveau directeur artistique qui ne me plait pas trop (Salvatore, reviens !). Par contre, le nouvel employé (joué par un ancien de Buffy) est génial, il est tellement minable qu'on ne peut que l'adorer. On revoit Duck, qui a sombré dans l'alcoolisme et sonne comme un avertissement pour Don en pleine dérive. Quand à Joan, elle est parfaite lorsqu'elle soutient ses deux collègues tendrement et console son vieil amant avec une grande élégance. 

Bien sûr, on ne peut s'empêcher de remarquer que la remise des prix est une mise en abyme malicieuse des Emmy Awards, qui été diffusé le même soir que cet épisode. Mad Men a remporté pour la troisième fois le prix de la meilleure série dramatique et cet épisode magnifique vient s'en vanter gentiment, en prouvant qu'elle mérite toujours son état de grâce.

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