2.08 Demain Est Si Loin


BILLY - S02E08 Demain Est Si Loin par billylaserie

Résumé : Alors qu'il lit paisiblement sur la plage, Billy est hanté par le fantôme de Richard Brewer, qui lui parle du temps qui passe et de la mort. À Lincoln City, l'exécution des Frères Coe approche. James Bell se retrouve alors partagé entre sa sympathie pour les prisonniers et l'ambition du Gouverneur Wallace... 

Commentaires : Les vagues, le vent, le sable, les pages d'un livre qui se tournent, un livre comme "Moby Dick" qui déborde d'existentialisme... Vous l'avez compris dès les premières secondes : voilà encore un épisode qui parle de la mort et du temps qui passe. Alors oui, j'use d'un symbolisme très simple et qu'on pourrait même qualifier de simpliste. Mais pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? C'est tout simplement que Richard Brewer fait son apparition et vient offrir à son ancien protégé devenu grand quelques phrases énigmatiques. 

Un Billy qu'on croyait guéri et qui ne désire plus qu'une seule chose : se ranger, profiter du temps qui lui reste. Seulement, le passé continue de le hanter, que ce soit à travers son ex-mentor, à travers la culpabilité qu'il porte toujours en lui concernant McNabb, à travers tout ce qu'il a laissé derrière lui et qui est prêt à le rattraper. C'est un dialogue entre la vie et la mort, un dialogue paisible, face au coucher de soleil. Oui, puisqu'on fait dans le western crépusculaire, autant se servir du coucher de soleil. Et de ce sentiment que le changement est une illusion et qu'une fois qu'on a eu le droit à toutes ces chouettes premières expériences, le reste n'est qu'une longue attente de la mort. De son vivant, Richard a offert à Billy l'occasion d'avoir de belles aventures. Maintenant, il est mort. Et c'est au tour de Billy d'attendre la fin... 


Même chose pour les Frères Coe. La dernière fois qu'on leur a rendu visite en prison, ils étaient encore plein d'espoir et tentait d'organiser une évasion. Maintenant, même les types les plus insouciants du récit ne se font plus d'illusions. On a jamais vu George et Frank aussi lucides et résignés. Et face à eux, on en découvre un peu plus sur James Bell. L'éternel intermédiaire. Assistant d'un Garrett pour lequel il n'a pas vraiment de respect, messager d'un Wallace qu'il méprise, Bell est un touriste dans cette ville grotesque. Alors il boit, passe le temps, sympathise avec ceux qui vont mourir. Il est là pour observer le spectacle avec flegme et détachement, pour s'amuser de la grandiloquence du Gouverneur ou de l'alcoolisme de Garrett. Et il sait bien que s'il s'implique davantage, ce sera la fin pour lui. 

Voilà, encore une fois je m'amuse à bien trop analyser mes propres personnages. L'épisode parle de lui-même de toute façon et j'aime son ambiance. Passer des lumières du Mexique à celles de la prison de Lincoln City. Attendre la mort en écoutant le bruit des vagues ou des cigales. Je sais pas pourquoi j'en dis plus ? 

Pour en finir, parlons Histoire : comme je vous l'avais expliqué auparavant, Wallace a bel et bien existé. Et fut véritablement Gouverneur du Nouveau-Mexique à cette période ainsi qu'écrivain. C'est lui qui est à l'origine de "Ben-Hur". Encore un trait de personnalité suffisamment intéressant pour que je l'exploite. Quand à James Bell, il a également existé et son rôle était bien d'être l'assistant du shérif et de veiller sur les prisonniers de Garrett. Mais comme avec les autres, vous allez voir que je me suis encore amusé à prendre quelques libertés... 


Anecdotes : C'est la scène dans le bureau de Wallace qui fut tournée la première et c'était d'ailleurs la toute première scène tournée avec Alexis. Notre James Bell débarqua le matin-même et eu à peine le temps de s'installer dans notre communauté qu'il était déjà propulsé en costume face au Général. Même si Etienne en impose, le petit nouveau ne s'est pas laissé décontenancé et a réussi à faire ses preuves d'emblée. Avec beaucoup de justesse et d'instinct, c'est de la nonchalance et de la spontanéité qu'il m'a proposé, transformant un personnage que j'avais écris sans personne en tête en type attachant que je regrettais déjà de ne pas avoir mis plus en avant. Et très vite, j'ai compris que je me retrouvais avec une belle addition à mon casting. Et plus tard, un très bon musicien qui allait nous pondre de belles mélodies pour la série. Et plus tard, un très bon ami et une présence merveilleuse dans l'équipe, tellement que tout le monde l'a plus ou mons forcé à rester le plus longtemps possible dans notre ferme de bonheur). Bref, voilà ma manière maladroite de remercier Alexis pour avoir magnifié aussi bien le personnage de James Bell et avoir réussi sans aucun effort à être devenu un membre essentielle de la team BILLY. J'aurais l'occasion de vous reparler de lui !

Poursuivons la valse des compliments avec Quentin et Louis, mes Frères Coe. Jusque là, ils étaient surtout des éléments de légeretés, deux rigolos au sein des Régulateurs, et c'était un domaine dans lequel ils étaient tous deux très à l'aise. Alors qu'on allait tourner cette scène, où la dimension dramatique est nettement plus marquée, je me demandais s'ils allaient être à la hauteur. Et comme d'habitude, je n'avais aucune raison de m'inquiéter. Quentin et Louis étaient tellement dans la peau de leurs personnages que le naturel fut une fois de plus au rendez-vous et d'autant plus poignant. Il a fallu peu de prises pour que leur dialogue avec Alexis fonctionne et résonne juste comme je le voulais. Encore une scène qui en passant de l'écrit à l'écran se retrouva encore plus percutante, à mes yeux. Alors merci à eux. 


Et merci à Kévin qui accepta de faire parti de notre dernière aventure. Celle qui nous a vu en équipe réduite partir pour la Vendée et les dunes de mon enfance, lors de la dernière semaine de tournage. Celle où nous avons tourné toutes les scènes au bord de l'Océan. Juste pour cette scène, il est venu avec nous, a réenfilé son costume que j'avais pris soin de ne pas laver pour que les tâches de sang et l'usure soient conservés et il a repris les traits de Richard Brewer en une seconde. Je sais que certains retours ne furent pas tendres avec lui lors de la première saison mais je persiste et signe : le contraste entre son énergie et celle de François sont parvenus à créer une relation mentor/élève encore plus percutante avec le recul et le temps qui s'est écoulé depuis sa dernière apparition. Et l'aspect un peu mystique de cette apparition fonctionne aussi grâce à Kévin, à son allure, à son mystère, à son énergie bien à lui. Et à un François qui était particulièrement émouvant dès qu'on le mettait en face de l'Océan. Une scène tourné face à un vrai coucher de soleil, alors que le vent soufflait fort et que la fin approchait. Un cadre tellement magnifique qu'on a même pas eu à retoucher à l'image et qu'on a pu se payer le luxe de conserver les couleurs naturelles. 

Je termine avec une anecdote plus personnelle. L'édition de "Moby Dick" présente dans l'épisode (et que Charlie utilisait déjà pour ramasser les feuilles mortes dans l'épisode du même nom) appartient à Jean-David Lemarié, notre scripte lors des premiers jours de tournage et que j'ai cruellement assassiné deux fois devant la caméra, alors qu'il était député ou médecin. Comme elle traînait souvent dans un coin de la ferme et que j'avais parfois besoin de m'isoler et de me reposer, je m'amusais souvent à la feuilleter. Jusqu'au jour où je me suis dit qu'il était temps pour moi de lire l'oeuvre de Melville en entier. J'avais étudié son auteur et les grandes lignes du récit à la fac mais je ne m'étais jamais attaqué à cette montagne. J'ai alors commencé à embarquer le pavé sous ma tente après les longues journées de tournage, lisant chaque soir quelques chapitres à la lumière d'une lampe torche. Parfois, en me posant dans le décor du saloon et lisant à la lumière d'une bougie alors que le vent soufflait fort dehors dans les toiles de tente, j'avais l'impression d'être moi-même à bord du baleinier d'Achab. Le romantisme du bouquin et sa structure me faisait pas mal cogiter concernant BILLY. Et j'aimais assez cette idée de fil rouge du tournage. Je me disais que si j'arrivais à tourner ces 44 épisodes et à lire ces mille pages en sept semaines, que rien ne pourrait plus jamais m'arrêter. 

Et puis, ayant de moins en moins de temps pour le lire et de plus en plus de fatigue, j'ai fini par laisser de côté le bouquin. Qui me narguait, posé à côté de mon lit. Me laissant un goût d'inachevé. Le temps passe décidément plus vite que nos rêves... 


Musique : "Tomorrow is A Long Time", un morceau de Bob Dylan, repris par Nick Drake. Je voulais l'original au départ mais comme j'avais déjà glissé du Dylan sur beaucoup d'épisodes, j'ai voulu offrir l'occasion à Nick de vous émouvoir à son tour. Avec cette chanson qui mêle la solitude à l'espoir, l'amour au désespoir, tout ça à la fois. On imagine le chanteur torturé en train de murmurer et jouer de sa guitare face à un public invisible, alors qu'on quitte notre Billy seul et hanté, sur la plage, au coucher de soleil. Demain est si loin. 

La semaine prochaine : C'est sous la canicule que l'on traversera la frontière mexicaine en compagnie de l'ami Garrett tandis qu'un nouveau client viendra rejoindre le bar de Sal...

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