Une fois n'est pas coutume, c'est Drum de pErDUSA qui m'a fait découvrir une série. Et à l'époque, je n'avais même pas Internet et pas assez d'argent pour m'acheter de coffrets DVD. Alors je connaissais Frasier, j'avais envie de voir Frasier mais je ne pouvais pas voir Frasier. Des années plus tard, me voilà qui approche de la fin d'un long rattrapage de onze saisons et plus de 200 épisodes, débuté à l'automne 2011. Drum m'a alors contacté pour que l'on discute de ces ultimes épisodes ensemble et nous avons sélectionnés les plus marquants pour dialoguer durant l'été. C'est à lire même si vous n'avez pas encore vu la série. Et c'est un fort encouragement à voir la série !
Dylanesque : Je te propose d'évoquer ce trio d'épisodes qui n'est pas vraiment un trio, plutôt un duo suivi d'un solo mais qui a un point commun : les deux ice queens de l'univers Crane sont au centre du récit. Qu'il s'agisse de Maris, celle de Niles ou de Lilith, celle de Frasier.
Drum : Excellent choix! La dernière saison se devait d’adresser ces deux femmes pour clôturer définitivement le sujet.
11x07 Maris Returns/11x08 Murder Most Maris
Dylanesque : Pour commencer, peut-être faut-il resituer le contexte pour ceux qui ne suivent pas la série (en même temps, je me demande bien ce qui les pousse à lire ce dialogue. Notre génie ?). Incarnée par une Bebe Neuwirth formidable, Lilith Sternin faisait déjà tourner la tête de Frasier dans Cheers, à l'époque où ils étaient tous deux mariés. Et chaque saison, les scénaristes de Frasier lui ont offert un épisode où elle a pu raviver la magie, des épisodes qui sont souvent très réussis ("Room Service" étant mon favori). Dès que Lilith est mentionné (souvent avec horreur par Martin !), je sais qu'on va avoir affaire à quelque chose de grandiose.
Drum : C'était devenu un passage obligé, tout comme les épisodes avec Bebe, l’agent de Frasier. Et comme tout est toujours mieux avec Martin, leurs rares interactions sont toujours parfaites. D’ailleurs ces personnages secondaires marquants récurrents ont toujours été un atout de la série. Non seulement, c’est toujours un plaisir de les revoir, mais elles permettent de ventiler un peu la série. Beaucoup de sitcoms oublient d’introduire ou d’utiliser des personnages marquants dont le retour fait toujours plaisir pour se contenter de sa distribution principale.
Dylanesque : Jusqu'à leur divorce au cours de la troisième saison et même après, Niles a mentionné son ex-femme très régulièrement, sa minceur et son irritabilité devenant un running-gag amplifié par le fait qu'on n'a jamais vu à quoi ressemblait le monstre en question. Jamais les scénaristes n'ont cédés à la tentation d'engager une actrice pour prêter ses traits à Maris, nous évitant ainsi une inévitable déception. Et pourtant, avec ce double épisode consacré (pour la dernière fois j'imagine) à celle dont on avait plus entendu parler depuis le mariage de Niles à Daphné, je m'attendais presque à la voir apparaître enfin.
Drum : A l’époque, l’idée avait été effleurée. TVGuide avait même proposé l’actrice idéale pour le rôle : Calista Flockhart. Elle aurait vraiment été douée dans ce rôle. J’avoue que Maris est un élément légèrement problématique pour moi dans le sens où le réalisme est, de saison en saison, de plus en plus mis de côté au profit de la vanne facile. David Hyde Pierce est d’ailleurs excellent à sortir ces blagues absurdes avec le plus grand des sérieux sans chercher à sur-vendre la blague («I haven’t heard her this panicked since her strengh gave her halfway through revolving doors»).
Dylanesque : Mais non, pas de Calista... Au lieu de ça, on a un double épisode qui enchaîne ce qui marche le mieux dans Frasier : la farce, les quiproquos, David Hyde Pierce en roue libre, un Frasier plus mesquin que jamais, un Martin blasé par le comportement de ses gamins mais qui se laisse embarquer quand même et une Daphné... Bon, tu avais raison, Daphné est quand même devenu vachement moins percutante ces derniers temps, se contentant de changer d'humeur sans arrêt avec, comme prétexte convenu, ses hormones de grossesse.
Drum : C’est le gros problème de Frasier. C’est une série écrite par des hommes qui ne savent pas donner de la profondeur aux personnages féminins. S’ils s’en sont sortis plutôt bien avec Roz, elle n’est que trop rarement utilisée dans une intrigue principale. Ils savent définir des personnages marquants, mais hors du trio des trois hommes, les femmes de la série ne sont pas toujours bien écrites hors de la machine à «one-liners». Mais dans le cas de Daphné, la situation s’est empirée. Elle avait une répartie joyeuse et taquine, cette saison, elle semble toujours être agressive.
Dylanesque : Car avant d'être un test pour le mariage Niles/Daphné, ce double épisode se concentre surtout sur Niles pour nous amener tranquillement vers son pétage de nerfs à poil au café Nervosa. Oui, Niles à poil. C'est aussi impensable que drôle à en pleurer. Pour ça, l'épisode est fort : il est juste à la frontière entre l'humour gagesque (avec quelque chose d'aussi tiré par les cheveux que cette histoire de meurtre) et la finesse d'écriture.
Drum : Toujours compter sur David Hyde Pierce pour vendre le matériel le plus absurde possible. Et bien évidemment, il n’y a rien de plus satisfaisant de le voir, à l’issue de ce double épisode, confronter Maris mais aussi des membres de sa famille quant à leurs comportements lors de ces épisodes.
Dylanesque : Alors je pense qu'on ne verra jamais Maris et si c'est le cas, je suis très satisfait de ce dernier clin d'oeil au personnage invisible le plus marquant de l'histoire des comédies (avec The Naked Guy de Friends peut-être).
Drum : C’est sur qu’elle bat a plates coutures la mère d’Howard de The Big Bang Theory et Stan, le mari de Karen dans Will & Grace.
Dylanesque : Il faut aussi mentionner le retour de Frasier à la psychanalyse dans son nouveau cabinet. L'occasion de voir défiler pas mal de guest-star (Homer Simpson ! T.R. Knight ! Sarah Silverman ! Et Valerie Mahaffey dans le rôle de l'assistante dévouée !) et d'offrir à Kelsey Grammer l'occasion de rivaliser avec son frangin de fiction pour ce qui est des gags visuels.
Drum : N’oublie pas Penny Johnson Jerrald de 24! Et tu fais bien de soulever la présence de Mahaffey. Le dernière fois que je l’ai vu était dans le pilote de Devious Maids. Ce re-visionnage me permet de garder une meilleure image de l’actrice!
Dylanesque : Est-ce que l'on va désormais suivre parallèlement son travail ici et son travail à la radio ? Je ne serais pas contre, c'est l'occasion de changer un peu la formule (même si je sais que ça ne t'enchante jamais trop de changer la formule). D'ailleurs, je me dis qu'avec un peu moins d'inspiration, la série aurait très bien pu se reposer très vite sur une formula "un patient par semaine" et elle ne l'a (presque) jamais fait. Cela dit, certaines périodes ressemblaient trop à "la petite amie de la semaine" et ce n'était pas franchement mieux.
Drum : Aucun commentaire pour te laisser découvrir la saison de toi même. Mais effectivement, le cabinet permet de voir Frasier dans un autre contexte, interagir avec une variété de personnages différents mais désire-t-on vraiment une occasion d’encore moins voir Roz alors que son «Are you all right?» au fiancé de Maris a déclenché mon plus gros sourire de l’épisode? Dans le 11.07, j’ai apprécié que Kelsey Grammer soit cantonné aux gags visuels pendant que David Hype Pierce avait l’intrigue centrale. J’ai toujours apprécié un acteur principal qui laisse aisément sa place à ses petits camarades.
Dylanesque : Oui, c'est toujours raffraîchissant de voir l'acteur principal dans un autre registre ou en mode plus discret. Comme Michael Scott dans "The Return", le premier exemple qui me vient à l'esprit.
11x09 Guns 'N' Neuroses
Dylanesque : L'épisode suivant est bien plus fin que son titre au jeu de mot douteux le suggère. Comme d'habitude, Lilith fait une entrée remarquée sous la forme d'un rêve de Frasier où un volcan de glace entre en éruption !
Drum : Les annonces de retour de Lilith sont toujours extrêmement réussie. Tout comme les réactions de Martin !
Dylanesque : Ensuite, le jeu du quiproquo marche aussi à plein gaz avec le rendez-vous arrangé et le duo a l'occasion d'évoluer dans une intrigue mêlant très bien l'humour et la nostalgie, comme il se doit lors d'une ultime saison. Et ce que je soupçonne être la dernière apparition de Bebe Neuwirth dans ce rôle. C'est presque dommage car je me suis laissé tenté par l'idée de voir Frasier se rapprocher de nouveau de son ex-femme lors de ces derniers épisodes. Après l'avoir vu tourné autour d'un grand nombre de love interest pendant onze saisons, je ne vois pas plus parfaite candidate et leur scène de psychanalyse pour les voisins de chambre prouvait à quel point leur alchimie était parfaite. Mais pour l'instant, Lilith disparaît derrière cette porte et tout comme Frasier, on lui lance un dernier regard un peu triste.
Drum : Frasier a toujours été l’histoire d’un homme qui va de l’avant, qui, n’abandonne pas et qui essaie. Le voir retourner avec Lilith serait un retour en arrière pour lui. La nostalgie de l’ultime saison ne doit pas céder à l’une des forces motrices de la série. Lilith le résume parfaitement «With one hand, the past moves us forward, with the other it holds us back. »
«Caped Crusaders for mental health» dans les termes de Sadie Doyle de The Thrilling Adventure Hour : ‘I WOULD watch that show!’
Dylanesque : Si tu le dis, j'avoue que la référence me dépasse. Je dois être trop jeune, mon vieux ! Le reste de l'épisode est très léger et équilibre bien la balance, avec un trio qui s'en donne à coeur joie et rend un hommage à toute la décoration bobo de Frasier. La dynamique Martin/Niles n'a jamais cessé de fonctionner. Dommage que Daphné ait perdu en saveur.
Drum : Ca me faisait pensé à ce jeu d’impro de Whose Line Is It Anyway? où chacun des membres d’un trio devait être soit assis, debout ou allongé. Niles et Martin font toujours une intrigue B toujours efficace. Elle aurait été peut-être plus drôle, mais moins logique, avec Roz qui décoche un sourire simplement avec une histoire de pourboire.
Dylanesque : Peut-être ! En tout cas, pour conclure, ce début de saison ne m'a pas déçu pour le moment. Si les lecteurs n'arrivent pas à suivre nos discussions, je les invite bien entendu à se dépêcher d'aller voir l'intégrale de la série ! L'été est encore long, c'est l'occasion !
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