Sunshine State. Vous imaginez si la série s'était appelé comme ça ? Est-ce qu'elle aurait eu une meilleure réputation ? Est-ce qu'elle serait resté plus longtemps sur ABC et devenu la sitcom la plus regardée depuis Friends ? Non.
Et pas la peine de refaire l'histoire parce qu'au final, nous avons eu le droit à six saisons, malgré un titre mauvais, réminiscence d'un début de série sous forme de faux départ. Après une décennie de Scrubs, ce bon vieux Bill Lawrence avait vendu comme pitch : Courtney Cox, la quarantaine, qui essaye de se réinventer avec des hommes plus jeunes. Au bout d'une poignée d'épisodes assez catastrophiques, le propos évoluera rapidement, grâce à la malice des scénaristes et à l'alchimie du casting en : Courtney Cox et ses amis boivent du vin toute la journée et passent du bon temps en Floride". Donc oui, Sunshine State est plus approprié. Quoi qu'il en soit, nous voilà avec le même résultat : six ans de bonne humeur avec cette comédie aussi routinière que particulière, qui risque de pas mal me manquer.
Quand je dis routinière, ça sonne péjoratif, je ferais mieux d'employer le terme "familière" ou "confortable". Car il est confortable de retrouver chaque semaine nos amis, de savoir que, même dans les épisodes les plus paresseux (et cette ultime saison manquait souvent d'inventivité), on risque de passer un bon moment et de finir la demi-heure avec un petit sourire satisfait. Ce final est réussi car il se fait la métaphore de ça : la réussite de Cougar Town, c'est qu'elle ne changeait jamais vraiment. Le retour permanent au status quo est quelque chose de récurrent chez Bill Lawrence mais, d'habitude, il donne au moins l'illusion d'une évolution. Ici, pas de couples qui se font et se défont à la JD et Elliot : quand on se trouve, on reste ensemble et les trois couples principaux du Cul-de-Sac se retrouvent même à habiter dans le même pâté de maison. Un gag fonctionne ? Mieux vaut le réutiliser mille fois plutôt qu'une (Penny Can, les verres qui cassent, les monologues de Laurie). Les carrières ne sont là qu'en toile de fond, les bébés naissent mais sont vite oubliés (qui se souvient de la fille de Grayson !) et la seule continuité qui compte, c'est celle de l'amitié et des relations entre chaque personnage. C'est pour ça qu'on regarde la série : pas pour qu'elle réinvente l'eau chaude mais pour que le vin coule tranquillement dans le verre d'une joyeuse troupe qu'on connait pas coeur et dont on ne s'est jamais vraiment lassé.
Alors oui, c'est très conservateur : pas de changements. Pas de véritables problèmes sociaux. Pas de mixité. Mais aussi : aucune prétention (et une auto-dérision présente à chaque générique). Pas de hors-sujets. Une qualité plutôt constante (je me souviendrais quand même de la deuxième saison comme de la meilleure et de la cinquième comme de la moins mémorable). Je pourrais même pas vous proposer un best of des épisodes car je vois Cougar Town comme un tout, un rendez-vous qui fait se sentir bien et déçoit rarement car j'en attendais rarement du grandiose. Qui savait aussi surprendre à l'occasion, quand le ton se faisait plus doux-amer et qu'on passait gentiment du rire aux larmes, autre spécialité de la team Lawrence (et aussi de la team Biegel, qui aura depuis fait ses preuves avec la trop courte Enlisted). Et on retrouve tout ça dans le prévisible mais attendrissant "Mary Jane's Last Dance", un final qui se montre suffisamment malin pour nous resservir un tas de running gags et une série d'adieux sans que ce soit trop forcé.
Saluons aussi le cast car c'était pas gagné d'avance. Mais avec le temps, Christa Lawrence nous aura fait oublié son manque d'expressivité pour devenir la reine du one-liner cynique. Brian Van Holt et Ian Gomez auront dépassés les limites de leur jeu restreint pour incarner de bons gars ultra-attachants (qui aurait cru que Bobby Cobb allait un jour me manquer autant ?). Josh Hopkins, qui était embauché au départ pour jouer le beau mec taciturne a aussi fait bien du chemin et sera devenu un outil comique sur lequel les scénaristes pouvaient toujours se reposer dernièrement. Dan Byrd... bon j'ai pas grand chose à dire sur Dan Byrd si ce n'est que Travis n'était pas si détestable que ça alors j'imagine que c'est aussi un peu grâce à lui. Et Busy Philipps, qui elle, était convaincante dès le début et qui, malgré une utilisation moins convaincante cette saison, aura toujours su porter avec un timing comique irréprochable l'énergie et le charme de la série. Souhaitons lui de retrouver du travail rapidement.
Quand à Courtney Cox, on peut la féliciter d'avoir humblement mené cette joyeuse troupe avec une putain d'implication. Là où certains de ses anciens camarades font des choix douteux et refusent qu'on leur vole la vedette, elle a rapidement joué le jeu en se mêlant naturellement à la petite troupe, sans tirer la couverture à elle. Présente aussi bien devant que la caméra, elle n'a pas abandonné le projet quand l'audience n'était pas au rendez-vous et je me retrouve aujourd'hui à penser que je préférais largement prendre un verre de vin avec Jules Cobb qu'un café avec Monica Geller.
Voilà donc une nouvelle série incontournable de "mon âge d'or", autrement dit une série que j'ai débuté à une période de ma vie qui se termine cette année et qui, au même titre que Parks & Rec, Justified, Parenthood et Mad Men mais à sa façon, aura marqué chaque saison. Par sa familiarité et sa bonne humeur. Sa simplicité.
"We're so lucky". Et nous aussi, c'était un privilège de passer autant de temps avec des gens privilégiés aussi charmants. Levons notre verre à la fine équipe du Cul-de-Sac et gardons un souvenir chaleureux de Sunshine State !
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