Bilan Saison 2

N’ayons pas peur des gros mots : j’ai binge-watché la deuxième saison de The WIre. Il faut dire que je m’ennuie pas mal depuis que je suis revenu prématurément de mon périple breton et que pour célébrer mon récent anniversaire, les coffrets DVD de la série en soldes furent un cadeau tout trouvé. Après avoir dévoré la première saison début juillet, il m’aura donc fallu moins d’une semaine pour m’avaler ces douze nouveaux épisodes.


Comme je l’expliquais la dernière fois, il est intéressant lorsqu’on regarde après tout le monde une série dont tout le monde vous parlé (et qu’on vous a même vendu comme meilleure série de tous les temps) de faire le point sur vos attentes et la réalité. Ce que je savais sur cette seconde saison était mince : Chris Bauer et Amy Ryan étaient de la partie (je connaissais le premier grâce à Third Watch et la seconde grâce à ça), on allait s’y intéresser aux docks de Baltimore et McNulty allait continuer d’être un motherfucker et même aggraver son cas. C’est tout.

Durant la première saison, je ne m’attendais à une œuvre aussi humaine et centrée sur les personnages. Car c’est surtout l’aspect naturaliste, fataliste et complexe qu’on m’avait vendu, le regard sur la chute du rêve américain, blablabla. Là, même chose : c’est mon attachement aux personnages et la manière dont chacun d’entre eux nous est présenté dans toute sa complexité qui m’a marqué avant tout. Et le côté addictif du show, auquel je ne m’attendais pas du tout, s’est intensifié à mesure que l’enquête avançait. Une enquête perdue d’avance, quasiment copié-collé sur celle de la première saison pour nous prouver que rien ne change. Il est d’ailleurs facile de comparer le parcours de Nick à celui de Deangelo par exemple et de comparer les deux résolutions, où encore une fois, les gros poissons s’en sortent et laissent les plus faibles s’entretuer, se faire coffrer ou continuer à flotter dans un déterminisme social tragique (mates comment je profite de l’univers des docks pour faire de la métaphore aquatique bien pompeuse).


Et malgré que cet aspect forcément prévisible, c’est addictif. Car on a de l’empathie pour tellement de personnes, qu’il s’agisse d’un flic irlandais alcoolique à la dérive ou d’un fils de docker syndiqué malchanceux qui se retrouve empêtré dans des traffics qui le dépassent. Car on veut savoir ce qu’il va leur arriver, car on est incapable de choisir notre camp et car tout cela est tellement parfaitement imbriqué et mis en parallèle qu’on a hâte de voir comment ce tragique puzzle va se construire. Et surtout, on a du mal à penser à autre chose ou à avoir envie de voir autre chose tellement ces types-là hantent ton esprit longtemps après le générique de fin.

Ayant fait la connerie de regarder « All Prologue » à deux heures du matin, il m’a ensuite été impossible de fermer l’œil sans repenser au parcours de Deangelo, sans doute le personnage le plus attachant à ce jour, et cette putain d’injustice qui le frappe une dernière fois. C’était pareil avec Wallace la dernière fois et là, ça frappe tout aussi fort. Tout comme la longue marche de Frank vers une mort certaine ou les larmes de Beadie quand elle va identifier le corps de Frank sur le quai. Je ne pensais pas pouvoir ressentir autant d’émotions devant les tribulations d’une bande de dealers de l’Ouest Baltimore dans la saison 1 et c’est rebelote avec les syndiqués des docks. Il suffit de passer outre l’aspect déconcertant du season premiere (euh... tout ça pour des vitraux, vraiment ?) et on replonge dedans sans souci et sans jamais qu’on nous prenne pour des cons. Une poignée de scènes suffisent à nous rendre la famille Sobotka ou Beadie attachante et en les ajoutant à des types qu’on a déjà appris à adorer comme Bunk, Lester, Daniels, Bubbles ou Omar, on a une recette miracle de récit complexe et bouleversant.


Tiens, en parlant de bouleversant, je tiens à signaler que ce James Ransone, que je n’avais jamais avant, est un acteur fabuleux. La scène où il se confesse à Landsman, les larmes aux yeux et tout tremblotant est un truc de malade (oui, un truc de malade, car je suis à court d’adjectifs dithyrambiques). On peut aussi mentionner son cousin, interprété par Pablo Schreiber, que je venais tout juste de découvrir dans le rôle de Pornstache, dans Orange Is The New Black, rien à voir donc. Quand à Chris Bauer, je pense qu’on est tous d’accord et que le type est pas près de retrouver un rôle aussi bien écrit. Mais si je parle de bouleversant, je pourrais aussi parler d’humour, car la série n’oublie pas d’être drôle, que ce soit grâce à ce bon vieux Bunk, à la réthorique de Landsman ou ces deux abrutis d’Herc et Carver. 

Bon, j’oublie un tas de choses parce que j’ai même pas parlé de Stringer, de Prop Joe ou du Greek. Que je ne m’attarde pas sur le discours de David Simon sur l’Amérique et de la construction romanesque du tout car Alan Sepinwall a déjà tout dit. Mais oui, encore une fois, les gens avaient raison et je n’ai pas grand-chose à redire sur la qualité de cette seconde saison. Si ce n’est que la version de Tom Waits (qui est l'originale) est la meilleure, que le Frère Mouzone est un peu trop caricatural à mon goût et colle mal avec l’univers de la série (qui n’a pas la place pour avoir un deuxième Omar) et que maintenant, je n’ai plus confiance en ce monde pourri de l’intérieur et que j’ai envie de me recroqueviller sous la couette car tout espoir est vain.

À moins que j’enchaîne avec la troisième saison car l’été est pas encore terminée.

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