BILLY - S02E21 Crépuscule par billylaserie
Résumé : Alors que James Bell tente de convaincre Pat Garrett d'arrêter le massacre, Billy est de retour au Mexique. Quand à Sal, il se retrouve auprès de Sarah alors que celle-ci perd peu à peu ses forces...
Commentaires : L'avant-dernier épisode de la série. Où je tenais à pousser à son paroxysme l'ambiance crépusculaire et fataliste de la deuxième saison. Crépusculaire, ça veut dire quoi ? Que le jour se couche et que l'obscurité va nous tomber dessus. Fataliste, ça veut dire quoi ? Qu'on ne peut rien faire pour empêcher le jour de se coucher et l'obscurité de nous faire disparaître à jamais. Dans cet épisode, les survivants de la série savent tous très bien qu'il n'y a pas de victoire possible et chacun réalise ce qu'il va perdre alors que le jeu touche à sa fin.
Commençons par James Bell, qui est le premier à quitter la partie. Comme je l'expliquais avec l'épisode "Délivrance", le personnage aurait dû mourir lors de l'évasion de Billy. Mais Alexis, son interprête, lui a donné tellement d'humanité et d'empathie que je décida d'en faire un complice du hors-la-loi, l'espace d'un bref instant. Là, on le retrouve auprès de Garrett, l'homme qui l'a entraîné dans ce merdier. Alors qu'on l'a souvent vu dans une position de type blasé et résigné, James Bell se montre ici plus courageux et décide de suivre son éthique et sa conception du Bien. Tout comme lui, on ne reconnaît plus le Garrett juste et sensible. Mais Bell est naïf d'envisager une porte de sortie et se fait trouer la peau dans l'encadrure de la porte. De nouveau, Garrett tire dans le dos de quelqu'un et se débarrasse de ceux qui le ramènent à la réalité. En attendant que Billy ne tombe dans son piège, il s'évade avec sa bouteille et détruit le roman de Charlie, détruisant ainsi tout espoir de postérité. Quitte à mourir, autant mourir pour toujours.
Dans le sous-sol du bar, son propriétaire se retrouve mal en point, en compagnie d'une Sarah qui agonise. On avait laissé la prostituée alors qu'elle décidait de suivre son propre chemin et de recommencer sa vie loin de Billy. On la retrouve sans que je vous donne plus d'explications sur ce qui l'a mené ici. Je vous estime suffisamment intelligent pour imaginer votre propre version : A-t-elle décidé elle-même de revenir sur ses pas pour retrouver son mari et tomba dans le piège de Garrett ? À vous de voir. La voilà en tout cas qui quitte elle aussi la partie et je voulais que ça se déroule en silence et qu'elle soit en compagnie de Sal, avec qui sa relation fut toujours assez compliquée mais qui, tout comme elle, se retrouve ici à cause de sa fidélité à Billy. Qui, tout comme elle, ne laissera aucune trace et n'aura aucune descendance. Ce sont les martyrs de la légende du Kid, les grands oubliés. Les deux personnages que j'ai inventé de toutes pièces. Et je voulais leur offrir ce dernier moment ensemble. Et offrir à Sal ce long monologue inspiré par tous les beaux et poignants discours de Sam, l'ombre fidèle de Frodon dans Le Seigneur des Anneaux. Un héros, lui aussi.
Quand à Billy, le voilà de retour au Mexique. La route fut longue depuis sa prison (oui, toujours pas de budget pour les chevaux mais il va falloir s'en remettre !) mais il ne faudra pas longtemps pour qu'il réalise que Garrett l'a devancé et a commencé à s'en prendre à ses compagnons. Le jeune hors-la-loi devra donc s'occuper lui-même d'enterrer Tom, qui a toujours trouvé en lui son inspiration. Et à défaut de pouvoir enterrer sa culpabilité, Billy est prêt pour la vengeance et l'affrontement final. Et vous, vous êtes prêts ?
Anecdotes : Comme souvent cette saison, on peut découper le tournage en trois temps. D'abord, tout ce qui se passe en haut du bar de Sal avec Garrett. J'ai tenu à ce qu'il s'agisse de la dernière scène tournée par Alexis car, comme je l'ai déjà expliqué, c'était important pour moi que les comédiens puissent suivre le même développement que leurs personnages (même si c'était parfois un concept compliqué à intégrer au planning, on le verra plus bas). Il a fallu peu de prises à Alexis pour réussir sa "cascade" et ce fut bien triste de devoir se séparer d'un personnage aussi attachant. Suite à mes demandes insistantes, il accepta tout de même de rester avec nous pour quelques jours supplémentaires et je le remercie pour sa présence toujours bienvenue avec nous (et pour ses compositions musicales). Je me souviens qu'après avoir tourné sa mort, nous sommes partis en équipe réduite en virée pour boire, manger du fast-food et prendre un peu de recul. Dans un jargon militaire, on pourrait appeler ça une permission !
Le saviez-vous ? Jean-Baptiste reste le plus habile d'entre nous pour ce qui est de manier un flingue. Il faut dire qu'avec Garrett, il a eu l'occasion de vider son chargeur pas mal de fois et sans jamais tressailler. Même chose pour ce qui est d'exploser un verre contre le mur ou d'aller puiser dans la folie d'un Garrett alcoolisé. Malgré mes indications spontanées et parfois un peu flous, il a joué le jeu à fond (ce qui est finalement la mission d'un comédien !). Je tenais au départ à ce que Garrett tire sur sa réflection dans le miroir, en hommage à une scène clé du film de Peckinpah. Mais vous imaginez bien que pour des raisons techniques, c'était impossible (le miroir n'était pas à nous) alors on a improvisé autre chose. À vous d'imaginer vers qui Garrett pointe son flingue...
C'est l'occasion aussi pour moi de vous parler du manuscrit de Charlie, qui fut écrit par David, son interprête. Quand il n'était pas occupé à tourner ou à être enrhumé, David était attablé avec sa plume et son encre et il ne fallait pas l'emmerder. Même s'il n'a pas eu le temps et l'énergie de remplir toutes les pages (certaines sont vierges en vérité), il a pu quand même y retranscrire des extraits de romans (dont "Moby Dick", le fil rouge du tournage !), des poèmes et autres élucubrations personnelles. Un long travail que Jean-Baptiste a dû détruire en quelques minutes... Quelques morceaux du manuscrit furent tout de mêmes sauvés et ceux qui le voulaient ont pu repartir avec ce souvenir !
Quelques jours plus tard, c'était au tour de Julie et moi de tourner notre ultime scène. Sauf qu'en fait, il y avait encore toutes les scènes à tourner dans les dunes et au bord de l'Océan alors pas le choix, nous devions dire adieu à nos personnages pour mieux les retrouver ensuite. N'empêche que l'émotion était là et que ce moment était intense. En tant que maquilleur officiel de l'équipe, je suis très fier de ce que ça donne sur ma gueule et sur celle de Julie. C'était troublant. Troublant aussi de devoir assister à l'agonie de Sarah tellement Julie me donnait envie de pleurer. Surtout qu'il m'a fallu pas mal de prises pour être satisfait de mon monologue (et je ne le suis pas encore tout à fait) et que Julie a donc dû rester comme ça pendant un long moment. C'était dur physiquement et émotionellement, mais ça en valait la peine. Si je n'ai pas l'occasion de le redire la semaine prochaine, je tiens à remercier Julie pour son engagement. Comme François, elle a eu beaucoup de doutes mais elle a su me faire confiance et j'ai su lui faire confiance. Et elle a offert à Sarah un visage, un corps, des émotions, une manière de parler, un putain de regard et une infinie tristesse qui trouve ici son paroxysme. Merci Julie.
La semaine suivante, nous étions donc au bord de l'Océan et c'est à la suite du tournage de l'épisode précédent que nous avons filmé Billy découvrant et enterrant le corps de Tom. Un moment finalement assez détendu car c'était amusant de voir François en chier autant à porter quelqu'un d'aussi léger qu'Aurélien. Et le faire tomber assez brutalement (ce sera dans le bétisier de la saison prévu prochainement). Malgré tout, la fin approchait et je pense que ça sent à l'écran, la fatigue sur nos visages, l'émotion, tout ça. Nous sommes le 7 juillet et ça tout juste un an que le tournage a commencé. Quel aventure, putain...
Musique : Comme la semaine dernière, les arpèges de Kaki King viennent ajouter un peu de tension et de mélancolie alors que James Bell repose sans vie. Et pour ce long montage final crépusculaire, il me fallait un morceau crépusculaire, forcément. "Not Dark Yet", l'une des chansons les plus émouvantes de Dylan (publiée en 1997 sur son bouleversant album "Time Out Of Mind") m'a semblé évidente et ce fut assez jouissif de voir que les paroles collaient quasi parfaitement au déroulement des images. Pour ceux qui maîtrisent l'anglais, je vous en propose ici quelques extraits.
"Shadows are falling and I’ve been here all day
It's too hot to sleep time is running away
Feel like my soul has turned into steel
I've still got the scars that the sun didn't heal
There's not even room enough to be anywhere
It's not dark yet, but it's getting there
I was born here and I'll die here against my will
I know it looks like I'm moving, but I'm standin' still
Every nerve in my body is so vacant and numb
I can't even remember what it was I came here to get away from
Don't even hear a murmur of a prayer
It's not dark yet, but it's getting there..."
La semaine prochaine : Le 14 juillet.
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