Dans la tradition HBO, l'avant-dernier épisode d'une série, c'est pas rien. David Chase avait lancé la mode et Terence Winter, bon élève, prenait bien soin de concentrer le paroxysme des saisons de Boardwalk Empire lors du pénultième épisode. "Friendless Child" allait être sanglant, bouleversant et offrir la véritable conclusion de la série. Sauf que non. Tandis que, la semaine dernière, on offrait une fin réussie à deux outsiders notoires, on a ici un épisode de transition avant le final. Quelque chose de crépusculaire mais trop chargé et désordonné pour émouvoir autant que prévu. Hélas, il faut bien le dire, une déception.
C'est que, comme je l'expliquais la dernière fois, les histoires de la pègre sont trop prévisibles et ne font que se répéter depuis déjà trop longtemps. Comme on nous l'a rappelé quand Van Alden n'a pas pu étouffer Al Capone, la vraie Histoire peut être tordue mais pas tant que ça. Avec la chute de Maranzano, on se lance même maintenant dans de la reconstitution. Alors si on a déjà ouvert une page Wikipédia sur la mafia new-yorkaise, on sait que la guerre opposant Nucky au trio Luciano/Lansky/Siegel est perdue d'avance. On n'a plus qu'à attendre de voir les personnages qui n'ont pas réellement exister tomber comme des mouches. Ici, c'est Mickey qui se fait descendre, interrompu dans un énième bavardage par une balle dans la gorge, une mort un peu triste mais lui correspondant bien. Et puis le garde du corps cubain tiens, histoire de faire le ménage. Eli, Willie et Margaret, les seuls survivants du clan Thompson, n'échappent à la mort que parce qu'il faut bien en garder un peu pour le final. Face à eux, l'ennemi devient de plus en plus caricatural à mesure qu'il devient intouchable, un peu à l'image de Capone justement. Même la répartie des ennemis au téléphone devient paresseuse. La tension est donc de moins en moins présente et n'égale en rien ce qu'était capable d'imaginer les scénaristes en terme de conflits entre gangsters à l'époque de la troisième saison par exemple. On sait qu'il ne reste maintenant plus qu'à abattre le roi déchu d'Atlantic City (qui a tout perdu mais qui avait déjà tout perdu il y a longtemps) et ça, ce sera bien sûr le clou d'un spectacle un peu trop prévue d'avance.
Surtout si ma théorie se confirme. Vous savez, ma théorie comme quoi le gamin qui veut absolument aider Nucky et qui refuse son argent se révélerait en vérité être Tommy Darmody revenu venger son père. Et que l'ultime scène de la série le verrait assassiner son "mentor" en balançant sur son cadavre cette liasse de billet, bouclant ainsi la boucle et résumant les deux thèmes majeurs de la série : famille et argent. Je suis loin d'être le seul à entrevoir ça et vu comment Gillian reprend le devant de la scène dans cet épisode, je suis prêt à ouvrir les paris. Ce qui rendrait les choses d'autant plus prévisibles et convenus, même si je suis jamais contre un peu de toutéliage, aussi maladroit soit-il et que ce serait toujours plus excitant qu'une simple exécution venue de New York.
Cela dit, c'est Gillian qui offre à l'épisode ses meilleurs moments. D'abord dans les flashbacks qui nous montrent de plus en plus précisément comment Nucky a pu être amené à troquer sa compassion et vendre son âme au diable (le Commodore étant dépeint encore plus ouvertement ici comme un monstre). J'aime les scènes avec Mabel et l'arrivée de Gillian dans cette petite famille, nous éclairant à foison sur les vieilles blessures de Nucky. Voilà des moments qui sont placés sous le signe de la faiblesse humaine et des états âmes de personnages qui sont encore humains et pas encore occupé à se tirer dessus sans arrêt. Ils sont plus complexes et c'est aussi pour ça que le montage final est résonnant (et l'aurait été encore plus s'il avait s'agit de la première apparition de Gretchen Mol cette saison) et offre un bel épilogue à cet épisode un peu bordélique (est-ce qu'il était utile de faire un détour aussi rapide à Chicago ?). De quoi prouver également que, niveau réalisation, on gère quoi qu'il arrive : ce plan de Torrio isolé face à la nouvelle garde, l'hommage à After Hours avec un Willie qui se retrouve libéré après une bien longue journée...
Malgré tout, j'avoue être un peu inquiet pour le final. Inquiet si mes théories se confirment, inquiet si elles ne se confirment pas. Cela prouve au moins que j'ai encore de l'affection pour les survivants et que les flashbacks auront fonctionné, si ce n'est pour que je comprenne mieux Nucky et observe sa chute avec un minimum d'intérêt. De toute façon, on connaît déjà la fin, il n'y a plus qu'à la regarder.
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