5.09 Blood Money

Je vais dire des choses qui ont déjà été dites mais que voulez-vous : tout le monde regarde Breaking Bad aujourd’hui. Le couple qui habite en face de votre palier, la femme de votre boulanger, les lycéens en vacances qui prennent des demis en terrasse. Tout le monde. Et personne ne peut leur en vouloir car oui, je n’ai jamais dit le contraire et sûrement pas ici, Breaking Bad est ce qui se fait de mieux à la télévision depuis 2008. La seule chose qu’on peut reprocher à certains (et ce fut problématique au printemps dernier lors de la troisième saison de Game of Thrones), c’est que le phénomène qui entoure la diffusion de cette ultime poignée d’épisodes entraîne une pression monstre sur ceux qui ont peur d’être spoiler.


Les rebondissements ne sont pas le seul argument de Breaking Bad, mais il est certain (et plus que jamais à sept épisodes de la fin) que la team de Vince Gilligan est passée maître dans l’art de créer des attentes et de construire méticuleusement la tension. Alors si jamais je tombe sur un connard qui s’amuse à spoiler sur Twitter ou à un abruti qui parle un peu trop fort en buvant son demi, je vais devenir méchant. Personne ne me gâchera cette dernière plongée dans l’univers de la série. À part peut-être moi, mes névroses et surtout, ma paranoïa.

Bon, j’ai beau avoir déjà chroniqué les cinq premières saisons et user la plupart de mes adjectifs dithyrambiques, je vais tâcher d’en trouver de nouveaux pour m’exstasier avec vous (et avec le reste des milliers de blogs qui l’ont déjà fait aujourd’hui) sur ces huit dernières heures. En commençant par ce season premiere aussi attendu que surprenant.

D’abord, tout comme dans « Live Free Or Die », il y a ce flash-forward crépusculaire qui ouvre les festivités. Walt vient de fêter ses 52 ans et revient à la maison pour récupérer sa ricine. D’abord, je pensais qu’il allait s’en servir pour mettre fin à ces jours. Ensuite, je me suis demandé si son cancer était bien là. Puis, je me suis dit que s’il revenait comme ça dans une maison abandonnée et livrée à la merci des jeunes du quartier (elle en aura vu cette piscine !), l’enquête le concernant était du passé. Où sont Skyler et les enfants ? Que fait la police ? Vers quelle bataille s’en va Walt avec tout cet équipement ? Affronter Hank ? Jesse ? Cinq minutes et déjà un milliers de questions. Pas de doute, Breaking Bad recommence.


Quand on doit attendre aussi longtemps pour retrouver une série que l’on adore, il y a d’ailleurs toujours une sensation un peu étrange lors de la reprise. Comme si c’était trop beau pour être vrai, comme s’il fallait se pincer pour y croire. Et quand en plus, on sait qu’on doit savourer chaque minute car chaque minute nous rapproche de la fin, l’expérience de visionnage est véritablement tendue. De toute façon, c’est pas nouveau, mieux ne vaut pas être cardiaque pour regarder Breaking Bad.

Surtout qu’une fois l’emblématique générique passé, on reprend direct à la sortie des chiottes, avec un Hank qui a tout compris. Qui ne réalise pas encore trop bien la situation, mais qui a tout compris. Bon, ça on le savait déjà mais maintenant, voyons comment il va gérer sa découverte. Et là, les scénaristes ne traînent pas. Alors que je m’attendais à voir son enquête suivre son cours en toute discrétion dans le dos de son beau-frère tout au long de la saison, il faudra seulement un épisode à Hank et Walt pour avoir leur première vraie confrontation. Un moment que l’on attendait depuis quasiment le début et qui ne déçoit vraiment pas.


Je ne crois pas que ce soit déjà le cas mais voilà : il faudrait quand même que Dean Norris soit un jour récompensé pour son travail sur la série. Il n’a pas à rougir de la comparaison avec Bryan Cranston et c’est particulièrement vrai dans cet épisode, où c’est pour lui que notre cœur bat. Oui, je ne le cache pas, je suis dans la team Hank. Il est loin le temps où j’arrivais à pardonner un tas de choses à Walt juste parce que les scénaristes étaient malins ou parce que Cranston était malin. On essaye pourtant de nous le revendre comme quelqu’un de bien : un retraité, qui s’occupe de sa famille, est gentil comme tout avec les employées de sa femme et lutte contre son cancer. Mais on n’est pas dupe et avoir revu la première partie de saison juste avant ce season premiere fait que ma mémoire ne sera pas courte cette fois : si Tony Soprano et Vic McKey méritaient ce qu’il leur arrive, Walt mérite encore plus ce qui devrait lui arriver.

Mais attention : c’est ce que je veux mais ce n’est pas forcément ce que je veux que la série fasse. Voir Hank coffrer son beau-frère est la fin logique et justifiée des choses. Pas forcément la fin divertissante, surprenante et inoubliable que l’on peut attendre de Breaking Bad. Alors je ne regrette pas que les choses aillent aussi vite : il n’y a de toute façon plus de temps à perdre et putain ce que cette scène finale en valait la peine. Elle est parfaite.

Et ce n’est pas comme si Hank était le seul souci de Walt. Il y en a d’autres à l’horizon et l’épisode prend bien le temps, entre son début et sa fin, de nous les rappeler. Revoilà déjà Lydia avec sa maladresse (ce qu’ils sont forts avec la personnalité de leurs personnages…) et probablement de futures emmerdes venues d’Europe de l’Est (Skyler va peut-être avoir son voyage sous la forme d’un bon petit kidnapping, qui sait ?). Saul a beau se la jouer détendu avec sa masseuse et sa salle d’attente rempli de nouveaux clients, on sent toujours qu’il est au bord de l’ulcère. Quand à Jesse…


Il aurait pu prendre l’argent et fuir le plus loin possible. Et là aussi, ça aurait été mérité et justifié et c’est tout ce que je lui souhaite, un meilleur vie, loin d’Albuquerque. Sauf que non, même chose : il reste huit épisodes et Jesse a encore son rôle à jouer. Le voilà pour le moment de retour à la case départ, à gamberger avec Badger et Skinny Pete dans l’ancienne maison de ses parents et à ressasser toutes les disparitions. Il y a eu Jane, puis Gale. Cette fois, c’est Andrew Sharp et Mike qui le préoccupent. Tellement qu’il finira par distribuer l’argent sale par les fenêtres, dans une triste tentative d’oubli, dans l’espoir vain d’effacer la culpabilité. Mais tant que Walt sera là pour le sermonner, lui mentir et l’utiliser, Jesse ne pourra pas guérir.

Un season premiere qui ne perd pas de temps, qui donne la part belle à tout le monde, qui redistribue habilement les cartes et qui te laisse sur ton cul. Que demandez de plus ? Savourons.

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